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L'histoire fascinante du Marais : voyage à travers les siècles des 3e et 4e arrondissements

Quartier du Marais

Le quartier du Marais représente l’un des joyaux historiques et culturels de Paris, s’étendant principalement sur les 3e et 4e arrondissements. D’anciens marécages transformés en terres agricoles, puis en lieu de résidence privilégié de la noblesse, le Marais a connu des métamorphoses successives qui en font aujourd’hui l’un des quartiers les plus prisés de la capitale.

Son architecture exceptionnelle témoigne de chaque période de son évolution, des vestiges médiévaux aux hôtels particuliers du Grand Siècle. Abandonné par l’aristocratie au XVIIIe siècle, transformé en quartier populaire et artisanal durant la Révolution, puis menacé de destruction au XXe siècle, le Marais doit sa renaissance à la loi Malraux de 1962.

Découvrons ensemble comment ce territoire, dont l’histoire s’étend sur plus de dix siècles, est devenu un véritable musée à ciel ouvert et un quartier emblématique de Paris.

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Des marécages aux premiers aménagements : naissance d'un territoire

À l’origine, le Marais était une zone marécageuse située sur la rive droite de la Seine. Cette terre humide s’étendait entre le cours préhistorique de la Seine (qui coulait au nord des actuels grands boulevards) et son lit actuel. Durant l’époque gallo-romaine, alors que Lutèce se développait sur la rive gauche et l’île de la Cité, cette zone restait inhabitée et n’était traversée que par quelques voies anciennes dont l’actuelle rue Saint-Martin et la rue François-Miron.

Les premières traces d’occupation humaine remontent au IVe ou Ve siècle avec une nécropole gallo-romaine sur le monceau Saint-Gervais, butte naturelle émergeant des marécages. C’est sur cette élévation de terrain, à l’abri des inondations, que fut construite au VIe siècle l’église Saint-Gervais, centre de la première paroisse établie hors de l’île de la Cité.

L’exploitation de ce territoire commence véritablement au IXe siècle avec l’aménagement de pâturages. Le drainage progressif des marais par le creusement de canaux d’écoulement permit, dès le début du XIIe siècle, la mise en culture de ces terres qui devinrent des jardins maraîchers (d’où le nom “Marais”) et des vergers. Comme l’indiquent les sources historiques, “ce marais exploité sous forme de pâturages dès le IXe siècle est progressivement drainé par le creusement de canaux d’écoulement ce qui permet sa mise en culture au début du XIIe siècle, céréales puis jardins maraîchers et vergers”. La transformation du paysage était alors engagée, préparant l’urbanisation future de ce secteur.

Le Marais médiéval : entre ordres religieux et premières fortifications

L’histoire médiévale du Marais est marquée par la présence d’importants domaines féodaux appartenant à des ordres religieux. Parmi eux, deux acteurs majeurs ont façonné le développement du quartier : l’ordre du Temple et l’abbaye Saint-Martin-des-Champs.

L’ordre du Temple s’installa au nord du quartier et y construisit un prieuré fortifié, à l’emplacement de l’actuel square du Temple. Les Templiers réalisèrent un important travail de lotissement appelé “Ville-Neuve du Temple” qui s’étendait jusqu’à l’enceinte de Philippe Auguste. De cette époque subsiste le tracé des rues de part et d’autre de la rue des Archives.

Parallèlement, l’abbaye Saint-Martin-des-Champs créa le bourg Saint-Martin-des-Champs entre les rues Saint-Martin et du Temple. D’autres établissements religieux s’implantèrent dans le secteur, comme les couvents des Blancs-Manteaux et des Billettes, dont le cloître est aujourd’hui le dernier cloître médiéval encore debout à Paris.

L’expansion urbaine du Marais suivit les périodes de croissance démographique et fut guidée par les fortifications successives de la ville. L’enceinte de Philippe Auguste (1190-1209) engloba une partie du territoire, qui se bâtit rapidement au XIIIe siècle. Puis l’enceinte de Charles V, édifiée de 1356 à 1358, fixa les limites nord-est et est du quartier, correspondant aux actuels boulevards des Filles-du-Calvaire et du Temple.

Au milieu du XIIIe siècle, Charles d’Anjou, frère de Saint Louis, établit sa résidence dans le quartier. Un siècle plus tard, le roi Charles V regroupa un ensemble de bâtiments connus sous le nom d’hôtel Saint-Pol, où il s’installa avec sa cour, attirant ainsi ses familiers dans le secteur. Comme l’indiquent les archives, “en 1361, le roi de France Charles V regroupe un ensemble de bâtiments connus sous l’appellation de l’hôtel Saint-Pol dans lesquels il s’installe et dans lequel vivra également son fils”. La proximité avec la Bastille, porte fortifiée mais aussi refuge en cas d’émeute, renforçait l’attrait stratégique du lieu.

La Renaissance et le Grand Siècle : l'âge d'or du Marais aristocratique

La Renaissance marque un tournant dans l’histoire du Marais. Après la stagnation démographique causée par les épidémies et la guerre de Cent Ans, l’expansion urbaine reprend au XVIe siècle. François Ier, à court d’argent, revend par lots l’hôtel Saint-Pol, permettant la construction d’un nouveau quartier entre le quai des Célestins, la rue du Petit-Musc, la rue Saint-Antoine et la rue Saint-Paul.

À la même époque, les religieux du couvent Sainte-Catherine-du-Val-des-Écoliers cèdent une partie de leurs terres cultivées. De ce lotissement de la “Culture Sainte-Catherine” subsistent aujourd’hui sept hôtels de la Renaissance, dont les hôtels d’Albret, Lamoignon et Carnavalet.

L’âge d’or du Marais commence véritablement au début du XVIIe siècle avec la création de la place Royale (aujourd’hui place des Vosges) par Henri IV entre 1607 et 1612. Cette première place monumentale de Paris, avec ses façades uniformes en brique et pierre, devient rapidement le lieu de résidence privilégié de la haute noblesse. Comme le décrit un récit d’époque : “La création de la place Royale (future place des Vosges) de 1607 à 1612 à l’initiative de Henri IV relance la construction de grands hôtels particuliers par la haute noblesse. Le premier ministre de l’époque Sully s’établit lui-même dans l’hôtel qui porte encore aujourd’hui son nom.”

La construction de la place Royale impulse un mouvement de construction d’hôtels particuliers dans tout le quartier. Les plus grands architectes de l’époque, comme François Mansart, conçoivent des demeures somptueuses pour l’aristocratie. L’ordre des Jésuites décide également de bâtir sa maison professe dans ce quartier des élites, autour de l’église Saint-Louis (actuelle église Saint-Paul-Saint-Louis).

L’urbanisation s’étend entre 1610 et 1640 sur les derniers grands espaces encore non bâtis du Marais : la Couture du Temple et la couture Saint-Gervais. Le dernier territoire encore vacant est aménagé dans les années 1690 sur des terrains appartenant à l’ordre du Temple, entre l’enclos du Temple et le boulevard du Temple.

Cette période faste fait du Marais le quartier à la mode, où réside la haute société parisienne, où s’épanouit la vie mondaine et intellectuelle, et où se développe une architecture civile somptueuse qui constitue aujourd’hui l’un des plus beaux patrimoines de Paris.

Le déclin progressif : du XVIIIe siècle à la Révolution

Dès la fin du XVIIe siècle, le Marais commence à perdre de son prestige auprès de la haute noblesse qui préfère désormais s’établir dans le faubourg Saint-Germain ou le faubourg Saint-Honoré. Ces nouveaux quartiers, plus proches de la cour de Versailles, offrent davantage d’espace pour construire de vastes hôtels avec jardins.

Si quelques beaux hôtels particuliers sont encore édifiés dans la première moitié du XVIIIe siècle, le Marais n’est plus le quartier à la mode. Toutefois, il reste le lieu de résidence privilégié de la moyenne noblesse, des magistrats, conseillers d’État et officiers de justice qui continuent d’habiter leurs hôtels ou appartements spacieux. Comme le note un curé de Saint-Gervais au XVIIIe siècle : “Qu’est-ce que le Marais ? Dans quel discrédit n’est-il pas tombé : ici logeait un prince de sang, avec toute sa cour, et c’est aujourd’hui un hôtel Garni ; ici logeait un premier président, et c’est aujourd’hui un loueur de carrosses…”

À la fin du XVIIIe siècle, alors que le quartier est saturé de constructions, un plus grand souci d’urbanisme apparaît. Les cimetières paroissiaux des églises Saint-Gervais-Saint-Protais et Saint-Paul sont transférés en dehors de la ville. Des marchés sont créés à l’emplacement de l’église Sainte-Catherine et de l’hôpital Saint-Anastase.

La Révolution française porte un coup fatal au prestige social du Marais. Le départ massif des élites qui fuient la Terreur ou sont victimes des confiscations révolutionnaires laisse de nombreux hôtels particuliers vacants. Ces bâtiments sont alors investis par une population de condition modeste : artisans, ouvriers et petits commerçants qui occupent les anciens hôtels et construisent des ateliers dans les cours intérieures.

Cette mutation sociale marque profondément le quartier et entraîne souvent une dégradation du bâti. Les grands espaces sont divisés, les décors intérieurs altérés ou détruits, et les façades modifiées pour satisfaire aux besoins des nouveaux occupants. Néanmoins, c’est paradoxalement cette occupation populaire qui a permis la conservation de nombreux bâtiments historiques, le manque de moyens empêchant leur destruction complète au profit d’immeubles modernes.

Le XIXe siècle : un quartier artisanal préservé des transformations haussmanniennes

Au cours du XIXe siècle, le Marais se transforme en un quartier essentiellement artisanal et commerçant. La démolition de l’enclos du Temple et de ses bâtiments au début du siècle libère des terrains où sont tracées quelques rues autour du carreau du Temple, suivies de la construction de la mairie du 3e arrondissement et de l’aménagement du square du Temple.

Contrairement au faubourg Saint-Antoine voisin, le Marais n’est pas un quartier politiquement agité. Tel que le décrit Balzac, c’est un quartier de rentiers, d’employés, de fonctionnaires, une petite bourgeoisie peu entreprenante qui cohabite avec une population ouvrière.

Un des aspects remarquables de l’histoire du Marais au XIXe siècle est sa préservation relative face aux grandes transformations haussmanniennes qui bouleversent le reste de Paris. Les grandes percées entreprises par le baron Haussmann ne touchent le secteur que marginalement : quelques projets comme la rue Roger-Verlomme qui devait faire partie d’un grand axe du boulevard Beaumarchais à la rue Rambuteau ne sont que ébauchés, tandis que d’autres comme les rues Turbigo ou Réaumur sont situées à sa périphérie.

Cette préservation relative permet au Marais de conserver son réseau de rues médiévales et Renaissance, ainsi que son importante concentration d’hôtels particuliers des XVIIe et XVIIIe siècles. Cependant, plusieurs bâtiments historiques sont tout de même détruits indépendamment des percées haussmanniennes, comme l’hôtel d’Effiat démoli en 1882 pour créer une impasse, la rue du Trésor.

Les autres édifices historiques sont souvent mal entretenus et défigurés par des constructions parasites, notamment des ateliers artisanaux installés dans les cours. Ces modifications altèrent l’aspect original des bâtiments mais préservent l’essentiel du gros œuvre, ce qui permettra ultérieurement leur restauration.

La fin du XIXe siècle voit aussi l’installation de nouvelles communautés dans le quartier, notamment les juifs ashkénazes fuyant les persécutions en Europe de l’Est. Ils s’établissent principalement autour de la rue des Rosiers, dans le secteur qui sera surnommé le “Pletzl”, créant ainsi une nouvelle dimension culturelle dans l’histoire du quartier.

Du délabrement à la renaissance : le Marais au XXe siècle

La première moitié du XXe siècle voit le Marais continuer sa lente dégradation. Le quartier, densément peuplé et largement constitué d’habitats insalubres, fait l’objet de débats sur la nécessité de sa destruction. Divers projets d’aménagement urbain prévoient la démolition d’îlots entiers, encouragée par des préoccupations hygiénistes mais aussi par des considérations spéculatives et parfois antisémites, notamment pendant l’Occupation.

L’îlot insalubre n° 16, espace compris entre la place Saint-Gervais, la rue François-Miron, la rue Saint-Paul et la Seine, est particulièrement visé. L’un des projets prévoit son arasement total à l’exception de trois bâtiments historiques (église Saint-Gervais, église Saint-Louis-Saint-Paul et hôtel de Sens). Une partie est effectivement détruite avant que le processus ne soit interrompu.

La Seconde Guerre mondiale porte un coup terrible à la communauté juive du Marais. Suite aux rafles, environ 25 000 personnes sont déportées et exterminées dans les camps nazis. Des plaques commémoratives apposées sur les façades témoignent aujourd’hui de cette tragédie.

Le tournant dans l’histoire du Marais se produit en 1962 avec la loi Malraux sur les secteurs sauvegardés. André Malraux, alors ministre de la Culture du général de Gaulle, fait du Marais le premier “secteur sauvegardé” de France, protégé par un plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV). Cette décision historique intervient alors que le quartier est délaissé et que des projets de démolition massive menacent son existence même. Comme l’explique un document d’archives : “En 1962, à l’initiative de l’écrivain André Malraux, alors ministre de la Culture, la loi sur les secteurs sauvegardés est votée. Il s’agit alors de protéger le Marais, dont l’hôtel de Sens et certains monuments avaient certes été classés, mais qui pouvait être démoli en grande partie. L’architecte Le Corbusier avait notamment ambitionné de le raser pour y construire des immeubles modernes.”

Grâce à cette protection, un vaste programme de restauration est progressivement mis en œuvre. Les façades sont nettoyées, les cours dégagées des constructions parasites, les intérieurs restaurés. Le Festival du Marais, créé à cette époque, contribue également à la redécouverte culturelle et artistique du quartier.

Ce processus de réhabilitation s’accompagne d’une gentrification progressive. Quartier populaire et dégradé jusque dans les années 1960, le Marais devient peu à peu l’un des quartiers les plus prisés de Paris. Les artisans et ouvriers sont progressivement remplacés par des catégories sociales plus aisées attirées par le charme et l’authenticité des lieux.

Le Marais multiculturel : diversité et communautés

Au fil de son histoire, le Marais a accueilli diverses communautés qui ont contribué à façonner son identité culturelle multiple. Cette diversité constitue aujourd’hui l’une des caractéristiques les plus remarquables du quartier.

La communauté juive du Marais, dont la présence remonte au Moyen Âge (XIIIe siècle), a connu une histoire mouvementée. Après l’expulsion des juifs de France au XIVe siècle, elle se reconstitue progressivement à partir du XIXe siècle. Entre 1880 et 1930, de nombreux juifs ashkénazes fuyant les pogroms d’Europe de l’Est s’installent dans le quartier, autour de la rue des Rosiers, créant un espace culturel vibrant surnommé le “Pletzl” (petite place en yiddish). Comme l’indique une source historique : “Au cours des années 1920, environ 110 000 juifs ashkénazes fuyant la misère et les persécutions s’installèrent autour de la rue des Rosiers, où se trouvent de nombreux restaurants et pâtisseries casher, des librairies, petites synagogues, lieux de prière…”

Durement touchée par la Shoah, cette communauté connaît un renouveau dans les années 1960-1970 avec l’arrivée des juifs séfarades d’Afrique du Nord. Aujourd’hui encore, malgré la gentrification du quartier, la rue des Rosiers et ses environs conservent une forte identité juive avec ses restaurants, épiceries et institutions culturelles, dont le Musée d’art et d’histoire du judaïsme installé dans l’hôtel de Saint-Aignan.

Le Marais abrite également, depuis la Première Guerre mondiale, une communauté chinoise originaire de la région de Wenzhou. Comme l’expliquent les archives : “Pendant la Première Guerre mondiale, la France manque de bras à l’arrière et particulièrement d’hommes durs à la peine. À la demande de la France, l’Empire du Milieu finit par envoyer plusieurs milliers de ses ressortissants, à la condition expresse que ces derniers ne participent pas directement aux combats.” Établie initialement près de la gare de Lyon, une partie de cette communauté s’installe en 1954 autour de la rue au Maire, dans le nord du 3e arrondissement. L’église Sainte-Élisabeth de Hongrie – Notre Dame de Pitié abrite d’ailleurs la Mission catholique chinoise.

À partir des années 1980, le Marais devient aussi un lieu d’implantation majeur pour la communauté LGBT+, qui se regroupe essentiellement autour de la rue Sainte-Croix-de-la-Bretonnerie. Bars, restaurants, librairies et commerces spécialisés s’y développent, marquant une mutation vers une plus grande visibilité. Ce “quartier gay” (au sens anglophone, englobant l’ensemble des populations LGBT) devient un symbole du renouvellement du quartier et contribue à son attractivité internationale. Toutefois, comme le note un observateur : “avec l’évolution des mentalités et sous la pression des prix de l’immobilier, les commerces LGBT sont progressivement remplacés par des boutiques de vêtements de marque”.

Le quartier accueille également, depuis le XIXe siècle, une tradition artisanale persistante, notamment autour du square du Temple où se concentrent, depuis le début du XIXe siècle, les fournisseurs de matériel d’horlogerie et les réparateurs-artisans en pendulerie.

Plus récemment, le Marais est devenu un important pôle artistique et culturel avec l’installation de nombreuses galeries d’art, particulièrement depuis la réouverture du Musée Picasso en 2014. Cette diversité culturelle et communautaire, alliée à la richesse de son patrimoine architectural, fait aujourd’hui du Marais l’un des quartiers les plus dynamiques et cosmopolites de Paris, véritable carrefour où se croisent histoire et modernité.

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